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16 août 2009

And all the shadows filled up with doubt

somewhere

Après avoir laissé partir Kha se remplir de couscous osbane dans le quartier pauvre de la banlieue pauvre de l'autre coté de la mer, vers minuit j'ai rejoint Lisa à la porte de sa cabine de projection, elle enfile une guitare sur son dos, une caméra dans le coffre, une chanteuse bipolaire sur la banquette arrière. Hit the Road. 3 heures de route de nuit à encaisser les premières agressions, la remise en cause d'absolument tous les choix du clip, en criant, forcément. Je retrouve les réflexes acquis avec les handicapés l'été dernier, tant pis pour elle, je reste très calme, je reprends tout depuis le début, June s'apaise, elle s'endort, enfin. Lisa me remercie du coin de l'œil, on parle musique et rivière, on arrive. Ensuite le travail, très vite, les pieds qui glissent sur les cailloux, la rivière aux airs de bayou, le générique super moite de True Blood comme principale référence, nos repérages les fesses dans l'eau la nuque au soleil la caméra au ras des vaguelettes que l'on envoie sur les mousses étranges de la surface. Chaleur, levers de soleil, du flare de partout et la chanteuse de plus en plus ingérable. Au troisième jour une énième crise, Lisa refuse de descendre tourner. On est simplement en train de lui tourner son clip gentiment, gratuitement, pour la servir elle et son art, d'où c'est censé être désagréable, pourquoi on devrait en souffrir, on est là pour faire du divertissement culturel, des images sur sa musique, rien que de jolies futilités. J'essaie encore une fois très calmement de tempérer l'agressivité, June me crache que je n'ai pas dû assez souffrir pour ne pas savoir encaisser sa façon juste ignoble de s'adresser à nous deux. C'est certainement ce qui me mettra toujours hors de moi, comment ce genre de pensées peut-être aussi généralisé, comment les gens qui souffrent s'imaginent toujours devoir faire souffrir les autres au moins autant, en se cachant derrière la pauvre excuse de vouloir les endurcir. Mais je ne veux pas m'endurcir, ça ne m'interesse pas d'aller me frotter à encore plus de violence pour quoi? me pourrir la vie mais au moins héhé je serais super forte? Elle en sait quoi de mon expérience personnelle de la violence? Je n'ai pas appris à l'aimer, les gens qui m'agressent je les sors de ma vie, c'est tout. J'apprends alors la grosse difficulté de devoir filmer quelqu'un qui me répulse, je fais de la merde, je me lève seule à 5h30 pour filmer le lever du soleil dans l'eau, Lisa me rejoint plus tard avec le reste de l'équipe, la bande des lesbiennes talent-tueuses déjà à moitié à poil. Elle me fait du charme comme ça pour rire et je réalise que je n'ai jamais vécu une entente de travail aussi parfaite, la confiance et l'estime mutuelles, aucune accroche, le tout qui glisse comme nos corps doucement dans l'eau. Alors je la laisse le soir poser sa tête d'oiseau sans nid dans mon cou, me jouer des chansons suaves dans la chaleur des nuits du Sud, me raconter les scénarios hot qu'elle écrit en ce moment, je me shoote aux huiles essentielles cocktail vitalité et je me dis que je pourrais facilement tomber de l'autre coté là tout de suite, dans l'odeur menthe poivrée/orange douce, sur un canapé rouge avec son demi sourire et son regard en dessous. Elle m'envoie des messages qui me donnent rendez vous l'après midi et "jusqu'à ce que tu n'en puisse plus ", on travaille joue contre joue en riant de nos directives farfelues, les yeux rivés au banc de montage, la canicule qui coule partout et les volets clos. Jordan m'envoie des messages qui me donnent rendez vous l'après midi pour visiter mon appartement pour un tournage, toujours dégoulinante de canicule les volets toujours clos je commence à craindre pour ma vie d'housewife pauvrement délaissée pour une petite semaine vu la façon dont on s'amuse à chatouiller mes hormones animales dès que l'homme est absent. J'attends alors, moite  en transe, restée sage mais l'esprit surchauffé, l'atterrissage cette nuit du vol Tunis - Toulouse. Il aura pris 8 kilos en 8 jours, il sentira bon la brique frite et le contrôle de passeport mais je l'attends fort, le lit sans drap, les yeux brillants.

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